A l’issue de la réunion du Conseil de paix et de Sécurité de l’Union Africaine qui s’est tenue le 13 juin 2015 à Johannesburg sur la situation au Burundi, les organisations de la Société civile burundaise engagées dans le vaste mouvement citoyen pour le respect de l’Accord d’Arusha et la Constitution, voudraient porter à la connaissance de la communauté tant nationale qu’internationale ce qui suit :
1. Les organisations de la société civile saluent la décision du Conseil de paix et de Sécurité de l’Union Africaine dans le sens qu’elle clarifie, complète et renforce davantage le contenu du Communiqué final pris à l’issue du Sommet des Chefs d’Etat de la Communauté Est-Africaine tenu à Dar es salaam en date du 31 mai 2015 ;
2. Les organisations remercient l’Union Africaine pour avoir rappelé sa détermination à « assumer pleinement les responsabilités découlant de son rôle de Garant de l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi d’août 2000, conclu après des efforts soutenus de la région et de l’Afrique dans son ensemble, avec le soutien de la communauté internationale ». A ce titre, ces organisations rappellent que l’Accord d’Arusha est totalement clair sur le nombre de mandats présidentiels qui se limitent à deux et demandent à l’Union Africaine, en sa qualité de garant, de contraindre le Président NKURUNZIZA à renoncer au troisième mandat qui est contraire à l’esprit et la lettre de l’Accord d’Arusha ;
3. Les organisations constatent avec satisfaction la décision selon laquelle la date des élections devra être fixée par consensus entre les parties burundaises, dans l’esprit du communiqué de la CAE du 31 mai 2015 demandant un report des élections, et sur la base d’une évaluation technique conduite par les Nations unies. Partant, les mêmes organisations appellent le Président NKURUNZIZA à renoncer au forcing électoral sans issue qui risque d’hypothéquer gravement la paix, et la stabilité du Burundi et de toute la région ;
4. Les mêmes organisations saluent également la décision prise de fixer un délai et des modalités précis pour le dialogue d’une part ainsi que pour le déploiement des observateurs des droits de l’Homme, des experts militaires pour le suivi du désarmement de la milice qui fait rage dans le pays ainsi que des experts sur les conditions de tenue des élections crédibles, transparentes et apaisées ;
5. A l’heure actuelle, les organisations condamnent le comportement du Gouvernement du Burundi tendant à continuer sa démarche solitaire qui va à l’encontre des pertinentes décisions qui viennent d’être prises par l’Union Africaine ainsi que celles du Sommet des Chefs d’Etat de la Communauté Est Africaine, notamment le refus du retrait de la troisième candidature du Président NKURUNZIZA, du désarmement de la milice IMBONERAKURE et d’un calendrier électoral consensuel ;
6. Les mêmes organisations déplorent les propos du ministre des affaires étrangères tanzanien qui, au sortir d’une rencontre avec le Président NKURUNZIZA, a osé contredire les décisions du Conseil de paix et de sécurité de l’Union Africaine et du Sommet des Chefs d’Etat de la Communauté Est Africaine. Il y a lieu de noter que ses propos remettent en cause le principe du consensus sur le calendrier électoral ;
7. Les organisations rappellent au Président NKURUNZIZA que la démocratie burundaise est une démocratie consensuelle et que le dialogue est un mécanisme de résolution pacifique des conflits qui a déjà fait ses preuves au Burundi et que c’est par ce même canal que l’Accord d’Arusha pour la paix et la Réconciliation ainsi que les différents accords de cessez-le-feu ont été obtenus, permettant par là un ancien mouvement rebelle d’accéder au pouvoir ;
8. La société civile note avec intérêt la décision du Conseil d’impliquer les principaux partenaires de la Communauté Internationale qui n’ont ménagé aucun effort pour aider le Burundi à résorber la crise actuelle. Cependant, il importe de faire remarquer que des mesures permettant un vrai dialogue doivent être prises notamment la désignation d’un médiateur consensuel, la libération des manifestants emprisonnés, la réouverture des media indépendants, l’annulation des mandats d’arrêt des leaders de la protestation contre le troisième mandat de Pierre NKURUNZIZA et un espace neutre permettant à tous les acteurs de se sentir en sécurité pour ce dialogue ;
9. Les mêmes organisations réitèrent leur détermination à protester pacifiquement contre le troisième mandat et déclarent que toute solution amenant au troisième mandat sera inacceptable car elle serait contraire à l’esprit et à la lettre de l’Accord d’Arusha tel que cela a été par ailleurs démontré à travers le rapport des hauts responsables des ministères de la justice de la Communauté Est-Africaine ;
10. Les organisations de la société civile, fidèles à l’idéal pour lequel plus de soixante-dix martyrs de la dignité et la liberté se sont sacrifiés, profitent de cette même occasion pour saluer et encourager la détermination des burundais qui viennent de lutter plus de cinquante jours pour la dignité du peuple burundais et présentent une fois de plus leurs condoléances les plus émues aux familles éprouvées. Les mêmes organisations appellent tout le peuple burundais à redoubler de vigilance dans l’unité et la cohésion en cette période cruciale où la paix et la sécurité restent menacées au Burundi.
Fait à Bujumbura, le 17 juin 2015.
Pour la Campagne Halte au troisième mandat,
Maître Vital NSHIMIRIMANA
Délégué Général de FORSC